LÉNA BLOU, LA CHORÉGRAPHE

Léna Blou. Une femme qui a une foi impavide dans la force culturelle de son île Guadeloupe. Son obsession est de révéler au monde les Savoirs ancestraux de la culture caribéenne. C’est aussi une artiste : chorégraphe, danseuse interprète, formatrice et chercheuse dans le sillon de la danse endogène guadeloupéenne et caribéenne. Directrice du Centre de Danse et D’Etudes Chorégraphiques et de la Cie Trilogie Lénablou. Le Centre de Danse et D’Etudes Chorégraphiques lénablou (CEDEC) a été fondé en 1990 et dispense des cours de Techni’ka, Moderne, Contemporain, Jazz, Moderne, Technique africaine, Classique, Eveil et initiation à la danse pour les enfants.

La Techni’ka

La Techni’ka est un long processus de recherche personnelle étalé sur une dizaine d’années pour mettre en lumière et rendre lisible la science, la technicité et les chemins d’explorations dans une démarche contemporaine. La Techni’ka est la résonance directe de la danse Gwo-ka (danse traditionnelle de la Guadeloupe), c’est un lien indéfectible avec l’histoire esclavagiste et coloniale. Le Gwo-ka est une réponse à cette histoire qui a morcelé les corps en les déracinant de leur terre d’origine et la techni’ka en est la résilience. Elle représente une véritable praxis mémorielle. Ce nouvel art corporel, représente en fait, une nouvelle perspective dynamique d’une tradition réinventée, forme de transmission contemporaine d’une culture endogène qui conduit à une forme de fortification, de stigmatisation et de clairvoyance d’un processus temporel éparse et qui indubitablement laisse des empreintes corporelles. Cette mémoire cellulaire conditionne la construction d’une civilisation caribéenne en émergence.

Le Centre de Danse et D’Etudes Chorégraphiques est un véritable vivier qui reçoit des élèves de tous horizons voulant s’initier ou se perfectionner à l’art de la danse. Au fil du temps, on constate un réel engouement vers la Techni’ka ceci dès le plus jeune âge. Cette nouvelle génération entretient un lien particulier avec leurs danses traditionnelles, tout en conscience celui d’hériter d’un savoir précieux qui s’extirpe d’un espace commun : la Guadeloupe. Le devoir de mémoire Lorsque l’on observe la danse Gwo-ka elle traduit à la fois le désordre psychologique, c’est une gestique chaotique, désordonnée en apparence mais qui révèle un hymne à la vie, une force d’adaptation incroyable que je nomme le concept du bigidi . L’expression corporelle est un indicateur signalétique pour comprendre la structuration de la société créole et caribéenne dans ses fondements premiers avec une lisibilité contemporaine et scientifique au-delà de mémorielle, elle vient conforter le travail des intellectuels en occurrence les historiens qui nous permettent de saisir l’émergence de  cette civilisation caribéenne. En dépit de l’impact de l’esclavage sur ces populations, le corps nous convie à décrypter une saisie anthropologique et c’est un espoir fabuleux pour ces territoires en devenir. Lorsque le projet de Sylvaine Dampierre m’a été conté, cela représentait un nouvel outil de transmission, de décryptage pour apprendre à nous accepter, à nous reconnaître, à nous aimer donc à nous assumer. Cette histoire extrêmement personnelle de Sylvaine devenait une parole commune. Sylvaine Dampierre a su avec subtilité, sérénité et une pincée d’amour nous exhorter à saisir notre histoire, en nous appuyant sur notre mémoire pour révéler au monde notre contemporanéité. Est-ce que le devoir de mémoire passe par l’expression corporelle ? Oui, car le corps est un réceptacle, comme si par une alchimie cellulaire le corps s’imprégnait, stigmatisait et à l’insu de la psyché, du corps pensant le corps physique inventait, tricotait, résiliait les douleurs et balisait l’avenir.